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9 novembre 2005

Entretien avec Gilbert Richer : Où va le système éducatif?
Martine Rioux, APP

Gilbert Richer est psychologue clinicien depuis 32 ans. Il a travaillé pendant 18 ans dans le milieu scolaire, au début de sa carrière. Il l’a ensuite quitté volontairement. En fait, il a décroché, comme bien des jeunes.

Je vous présente quelques bribes d’un entretien que j’ai eu avec lui à l’occasion de la sortie de son plus récent livre. Je vous avertis tout de suite : ses propos risquent de vous faire réagir, ce qui est bien sûr voulu. N’hésitez pas à utiliser la fonction de commentaire au bas de cet article pour partager votre propre opinion sur la question!

Selon M. Richer, « on a fait du système d’éducation un système de formation de la main-d’œuvre. On ne mise plus que sur la connaissance. On a complètement mis de côté le volet véritablement éducatif de l’école. Les matières qui permettraient aux jeunes de réfléchir et de développer des facultés sociales comme la formation personnelle et sociale ou l’enseignement moral et religieux sont même appelées à disparaître ».

Il se plaît à rappeler les paroles du philosophe Alain : « L’enfant n’est pas un vase qu’on remplit, mais un feu qu’on allume ». Il se questionne d’ailleurs sur cette tendance à « remplir » plutôt qu’à « allumer ». « À quoi cela sert-il de connaître les caractéristiques du bouclier canadien, les faits marquants de la Deuxième Guerre mondiale et je ne sais quoi encore, si l’on n’est pas outillé pour faire face à la vie? ».

Et même ces connaissances de base, les élèves en acquièrent de moins en moins, selon lui. M. Richer soutient que le contenu pédagogique a été passablement dilué au fil des années. Les enseignants qui passent par son bureau l’admettent volontiers. Ils dépensent de plus en plus d’énergie à faire de la discipline et de moins en moins à enseigner. La consommation d’antidépresseurs chez les enseignants est d’ailleurs en hausse. Entre 20 % et 25 % des jeunes enseignants quittent désormais la pratique après moins de cinq années de travail.

« C’est le bordel! On a perdu la définition de ce que devrait être une véritable éducation. Le milieu scolaire n’est plus ce qu’il était », s’indigne-t-il.

À qui la faute? Je crois qu'on pourrait en discuter pendant des années. Chose certaine, ce n’est pas uniquement le système d’éducation lui-même qui est en cause. « L’école doit maintenant pallier les lacunes dans l’éducation que les enfants reçoivent de leurs parents. Parce que l’école ne prépare pas les futurs parents à assumer leurs rôles et leurs responsabilités. Les parents savent comment montrer à un enfant à attacher ses lacets et à manger seul, mais ils ne savent pas comment l’accompagner dans le développement de son identité et de sa conscience. On ne leur a jamais enseigné ce genre de chose », déplore M. Richer.

J’aurai l’occasion de partager avec vous sa vision de la responsabilité parentale dans un prochain billet.

Deux pistes de solution
Le psychologue lance deux pistes de solution. Elles s’adressent directement au gouvernement qui a le pouvoir de changer le fonctionnement du système scolaire. Elles touchent tout particulièrement les écoles secondaires, étant donné que, selon lui, les polyvalentes sont devenues des usines à produire une main-d’œuvre automate qui ne pense pas vraiment par elle-même.

Premièrement, afin que les connaissances de la psychologie ne soient plus réservées à de petits groupes d’initiés et qu’elles puissent servir à un plus grand nombre de personnes, qui auraient grand besoin de connaissance sur la vie, il suggère qu’un cours de psychologie soit inscrit obligatoirement à l’horaire des élèves dès la 3e secondaire. Il entend d’ailleurs militer en ce sens au cours des prochaines années.

Deuxièmement, il aimerait bien que le gouvernement reconnaisse que la création des polyvalentes a été une erreur. « Pourquoi ne pas faire des écoles secondaires de quartier comme pour les écoles primaires? Cela permettrait aux jeunes de développer des relations plus significatives entre eux et avec leurs enseignants. Ils développeraient du même coup un sentiment d’appartenance plus fort face à leur milieu, ce qui permettrait sans doute de résoudre certains problèmes de comportement. »

Que pensez-vous des réflexions de Gilbert Richer?

Gilbert Richer vient de publier le livre « Par le bout du nez; La psychologie de l'enfant roi et la compétence parentale ».
Pour en savoir plus, cliquez ici.


Par Martine Rioux, APP


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